“Freedom Road” de Indra Rios Moore, dans l’air du temps.

Une voix, un titre, une chanson qui éveillent les consciences à une problématique profonde et tellement bafouée ; tout en exaltant les délices de la vie. Ainsi le nouvel opus d’Indra Rios Moore. La quarantaine atteinte, la chanteuse affirme ses convictions et s’installe de plus en plus comme voix déterminante dans le jazz, par les lumineuses reprises que l’on retrouve dans l’album.

En ces moments où la liberté, celle de pensée surtout, est devenue sujette à confiscation par tous les subterfuges possibles, à l’image de ce que décrit Edward Bernays: “La manipulation consciente, intelligente, des opinions et des habitudes organisées des masses joue un rôle important dans une société démocratique. Ceux qui manipulent ce mécanisme social imperceptible forment un gouvernement invisible qui dirige véritablement le pays.“, écouter les paroles de Langston Hughes procure toujours un réel plaisir et une lueur d’espoir. Exactement à l’image de cet espoir qui naît chez ces peuples longtemps martyrisés par une idéologie haineuse, méprisante et prétentieuse, celle qui a fait dire à Jean ZIEGLER, cette phrase d’une justesse imparable et qui colle aussi bien à l’actualité qu’à l’esprit de l’album Freedom Road:
L’ordre occidental du monde relève de la violence structurelle. L’Occident s’affirme porteur de valeurs universelles, d’une morale, d’une civilisation, de normes en vertu desquelles tous les peuples du monde sont invités á prendre en main leur destin.
Mais cette prétention séculaire de l’Occident est aujourd’hui radicalement contestée par l’immense majorité des peuples du Sud. Ils y voient une insupportable manifestation d’arrogance, un viol de leur identité, un déni de leur singularité et de leur mémoire
.”


Qu’on lise Freedom train de Langston Hughes ou que l’on écoute la magistrale reprise de Freedom road (Josh White) qu’a faite Indra Rios Moore, les émotions sont les mêmes et l’envie de donner ou de redonner du sens à la vie reprend le dessus et invite à l’action. Une véritable source de joie, un hymne au bonheur, à l’image de Keep On The Sunny Side, Gimme Some Of that Joy.

Avec Freedom Road, c’est la marque Indra Rios Moore qui s’exprime dans son entièreté. Indra Rios Moore fait du Indra Rios Moore. On retrouve une fois de plus dans cet opus, tous les éléments qui ont construit sa réputation et font d’elle, une figure qui compte dans l’univers du jazz. L’intensité et la beauté qui se dégagent de l’album, lui procurent également une telle puissance, qu’il est impossible de lui résister. Pouvait-il en être autrement, la liberté étant le bien universel le plus recherché, et lorsqu’on en a le chemin comme vient de le tracer Indra Rios Moore, comment ne pas y céder…

Indra Rios Moore ne fait pas qu’avec la chanson « Freedom road », sublimer l’œuvre de Joshua Daniel White, elle sort ce dernier d’un certain oubli et anonymat en l’inscrivant dans la continuité d’un combat qui n’a jamais trouvé l’issue escomptée par ses initiateurs/trices. N’est-ce pas Malcom X qui rappelait :”Vous n’avez pas profité de ces fruits. Vous n’avez profité que des épines“. Elle ne fait que nous indiquer que la liberté est une lutte de longue haleine, pour devoir enfin profiter des fruits. Un album d’une portée historique et qui questionne davantage le présent.

Keep On The Sunny Side