Black Lives_From Generation to Generation, un collectif de 25 musiciens, pour un devoir de mémoire face à l’idéologie suprémaciste blanche.
Jean Paul Sartre:”Qu’est-ce donc que vous espériez, quand vous ôtiez le bâillon qui fermait ces bouches noires ? Qu’elles allaient entonner vos louanges ? […] Voici des hommes debout qui nous regardent et je vous souhaite de ressentir comme moi le saisissement d’être vus. Car le blanc a joui trois mille ans du privilège de voir sans qu’on le voie; il était regard pur, la lumière de ses yeux tirait toute chose de l’ombre natale, la blancheur de sa peau c’était un regard encore, de la lumière condensée. […] Aujourd’hui ces hommes noirs nous regardent et notre regard rentre dans nos yeux; des torches noires, à leur tour, éclairent le monde et nos têtes blanches ne sont plus que de petits lampions balancés par le vent.“
De l’Afrique aux Amériques en passant par les Caraïbes, ils se sont mobilisés pour dire stop à l’idéologie de la haine. Cette haine que continuent de véhiculer les caciques héritiers des thèses d’une race blanche qui vit dans le mirage de vouloir dominer les autres et, partant, se positionner en parangon des vertus. Pourtant, et pour paraphraser Jean Martin Mbemba, qui voudra bien écrire objectivement les pages d’histoire de l’humanité devra sans peine tremper sa plume dans un torrent de sang nègre. Le mouvement Black Live Matters est depuis les 5 dernières années, le symbole de la réaction à cette barbarie qui a le vent en poupe.
“L’Occident a dominé le monde non pas par la supériorité de ses idées, de ses valeurs ou de sa religion mais par sa supériorité à recourir méthodiquement à la Violence. Les occidentaux l’oublient souvent, les Autres ne l’oublient Jamais.“
Samuel Phillips Huntington
C’est partant de cet oubli savamment entretenu, que le collectif des 25 musiciens africains et afro-descendants, comme un seul individu, s’est levé pour dire stop et rappeler que le combat doit continuer. Car la bête féroce et immonde, telle une pieuvre, a plusieurs tentacules et n’entend surtout pas cesser son activité négrophobe dont les axes principaux sont l’assassinat, le meurtre, le lynchage, la calomnie, la négation de toute humanité à tout ce qui ne lui ressemble pas.
” Black Lives_From Generation to Generation” le nom n’est pas anodin. Il en dit déjà assez et long sur ces atrocités aussi séculaires que séquellaires que subissent les noirs depuis des générations…et qui se poursuivent allègrement. Preuve que le travail entrepris depuis le temps par les Nina Simone, Marvin Gaye, Michael Jackson, Archie Shepp, Bob Marley, Odetta Holmes, Charles Mingus, Sam Cooke, Aretha Franklin, Curtis Mayfield, John Coltrane, Sonny Rollins, Abbey Lincoln, Max Roach, Myriam Makeba, James Brown, Mahalia Jackson, John Lee Hooker…n’a trouvé ni écho, ni oreilles favorables auprès des haineux.
Affirmant respectivement l’un et l’autre “la musique est l’arme du futur” et “(…),moi je ne baisse pas ma garde quand je joue“, Fela Anikulapo Kuti et Miles Davis avaient déjà perçu l’utilité de la musique et l’intérêt de garder en permanence de vue, que le combat contre cette négrophobie est de tous les instants et qu’il est impératif de rester en éveil et de ne jamais baisser la garde. Myriam Makeba ne rappelait-elle pas aussi à son époque dans une de ses chansons, La luta continua. Preuve que l’idéologie négrophobe est la matrice de fonctionnement d’une certaine société qui n’entend visiblement pas se défaire de ses maux et vivre pacifiquement et harmonieusement avec les autres.
Ce projet rassemble plus de 60 musiciens, qui jouent une grande variété d‘instruments : saxophone, trompette, trombone, vibraphone, guitare, batterie, basse, chant, piano, claviers, platines, le tambour ka, n‘goni, djembé et tama. La présence d’une chorale malienne, composée exclusivement de filles dont l’âge varie entre 7 et 13 ans, vient également rappeler l’importance de rallier dès leurs jeunes âges, les enfants afin de les sensibiliser à cette cruauté à laquelle, ils feront face les années à venir. Et quoi de plus juste et fondamentale encore, si les jeunes filles y sont sensibilisées. Le projet n’est-il pas produit par une jeune dame ? Et de surcroît, blanche. Prêtons plutôt attention à son propos.
Stefany Calembert:
J‘ai été témoin de racisme toute ma vie et j‘ai souvent été profondément troublée par l‘air de supériorité et l‘hypocrisie des blancs. Même ceux qui ne sont pas racistes se sentent généralement mal à l‘aise de discuter la question du racisme, qui reste un sujet très tabou et un mal social que nous nions en grande partie. En tant que personne blanche, je voulais faire ce projet pour ouvrir un dialogue sur ce problème mondial. Trop souvent, la communauté noire est livrée à elle-même, mais nous devons tous prendre conscience de la réalité quotidienne du racisme et de l‘injustice et la douleur qu‘il inflige.
J‘espère que tous les auditeurs de cet album comprendront son message principal : Unissons-nous contre le racisme à travers la musique. Amplifions la voix des vies noires (black lives) dans toutes les parties du monde, à travers les générations et les divers styles musicaux.
“Black Lives_From Generation to Generation” ce sont donc 20 chansons par 25 compositeurs et 60 musiciens comme sidemen dont Joël Ross, Ben Williams, Vincent Henry, Arnaud Dolmen, Ralph Lavital, Isaiah Weatherspoon, Bobby Sparks, John Hebert, Clarence Penn, Michael King, Etienne Stadwijk, Franck Nicolas et Christie Dashiell pour n‘en nommer que ceux-là…
La sortie officielle prévue pour le 25 mars prochain. Un album qui saura parler à l’humanité qui dort en chacun de nous, pour un monde meilleur. Un album dont on a besoin et qui rappelle la nécessité de se souvenir de l’histoire, ainsi Oruno D Lara :”Ceux qui ignorent l’histoire, qui ne cherchent pas à la comprendre, sont toujours plus ou moins les complices de leurs oppresseurs.”