Abel Selaocoe nous introduit dans son “Hae Ke Kae”.

Comme bien d’autres musiciens de la République Sud-Africaine avant lui, Abel Selaocoe est le symbole de ces trajectoires improbables, incertaines, qui défient ces destins que l’on croit parfois tracés à l’avance et s’annoncent comme des “condamnations”. Des parcours que l’on pouvait à priori qualifier d’infructueusement porteurs. Parce que issus des townships, le scénario serait tout tracé pour un futur moins lumineux, pour ne pas dire sans perspectives favorables. Mais, c’est justement dans ces contextes et ingrédients à priori défavorables (et pour cause…) qu’ils tirent avantage, se construisent, pour devenir des astres lumineux.

C’est dans cet esprit qu’il faut aller à la rencontre du violoncelliste Abel Selaocoe et de son premier album Where Is Home officiellement sorti ce 23 septembre chez Warner Classiscs. A l’image de son auteur-compositeur, l’œuvre est rattachée à sa terre, enracinée dans son environnement comme force et source créatrices, loin d’une lecture pessimiste, celle d’un refuge à la fuite d’un danger. Par cette lecture, Abel Selaocoe nous rappelle sa compatriote Pumeza.

Abel Selaocoe/©Photographe: Antonio Olmos

Hae Ke Kae 3 mots qui signifient “Où est ma maison“. Une maison bâtie sous le sceau de la sagesse Umuntu, ngumuntu, ngabantu. Une philosophie qui consacre l’individu à travers d’autres individus. Car le virtuose de l’arche qu’est Abel Selaocoe, ne s’est construit que par cet élan de générosité des autres à son endroit ce, dès le cocon familial jusque dans les méandres des institutions. Et les 16 pistes de l’album en direction des mélomanes font œuvre de passeurs. Passeurs des deux mondes qui caractérisent la musique du violoncelliste, (le classique et les musiques traditionnelles de l’Afrique) et dont l’archet, tel un griot, est l’outil central qui coordonne, guide et éclaire le reste.

En désignant Yo-Yo Ma, autre violoncelliste et quasiment mentor, pour reprendre le très fameux et emblématique Ibuyile iAfrica,  Abel Selaocoe nous livre la conception de sa musique et du monde; et par la même occasion, lance une invitation à chacun d’inventer le meilleur par le pouvoir de son ou ses instruments à sa disposition. Lui ayant fait le choix de l’archet et du violoncelle pour faire surgir la beauté et la puissance des chants et rythmes de l’Afrique. Une fois à l’intérieur de Hae Ke Kae, on a plus qu’une envie, ne plus en sortir ; car soyeux, lumineux et gracieux.

Hlokomela