Ruth Kotto, le diamant se polit.
Par Georges Ngando|Tribune2lartiste.com
Ruth Kotto a-t-elle trouvé ses voix et voie musicale ? Sans doute ! Elle a mis sur le marché depuis le mois d’octobre un nouvel album – son deuxième solo -intitulé Bonam, qui veut dire Bénédiction. Prémonitoire ? Peut-être.
Formée dans les studios et cabarets de Douala, son potentiel n’avait jusque-là été révélé, et encore moins exploité, à sa juste valeur. Avec Bonam, Ruth Kotto se hisse et se positionne dans un groupe d’artistes qui comprend peu d’élus (et dans lequel in fine les femmes tiennent le haut du pavé) au Cameroun. Une partie du mérite revient indiscutablement au compositeur et réalisateur de cet album, à savoir Toto Guillaume, référence musicale camerounaise s’il en est. .
Un nom en héritage, lourd à porter et assumer
Devoir se faire un prénom était sûrement la chose la moins aisée – et qui sait – la plus frustrante aussi pour cette jeune femme, tant le public et ce qui tient lieu d’industrie musicale camerounaise, l’ont scruté dès ses premiers pas en solo dans la musique. L’ombre du frère aîné a toujours plané sur elle et ce qui devait être un booster semble plutôt, être devenu un handicap. Trop de pression. Et toujours la comparaison. Dur, dur d’être la sœur de … Et quand il s’agit de Kotto Bass, c’est encore plus difficile.
En 2003, elle sort un premier album Dame de cœur qui ravit le public, notamment avec le titre « Ton pied, mon pied ». Mais indiscutablement, c’est avec ce nouvel album, Bonam, que Ruth Kotto coupe le cordon ombilical, fait sa mue et dévoile sa propre personnalité musicale. Une mue qu’on a pu percevoir dans le mini album Nyambe ( 3 titres – une sortie confidentielle) paru il y a quelques années.
La métamorphose est donc achevée ; la choriste Ruth Kotto est devenue en l’espace d’un album la chanteuse Ruth Kotto. Et dans un registre très exigeant, elle s’impose d’emblée comme une pièce maîtresse, avec laquelle, dorénavant, il faudra compter.
Un seul extrait suffit amplement à le justifier, « Na ma timba ». Le septième titre est celui qui reflète le mieux la nouvelle Ruth Kotto : une mélodie easy listening sur laquelle « La Kotto » pose une voix sensuelle et chaude à souhait. Piano et voix. Que dire de « Ngea » ? L’instrument voix y est sublimé sur un bolobo teinté de sonorités jazz. Autre titre « Dimbea mba ». Il nous plonge dans un saudade qui nous rappelle la légendaire Cesaria Evora. Comment réinterpréter un tube de son propre réalisateur sans le dénaturer ? Ruth Kotto réussit ce challenge dans sa reprise de « Songa la modi » de Toto Guillaume, auquel elle donne une nouvelle couleur, une nouvelle vie. Tout en jazz.
Dans Bonam, Ruth Kotto n’a pas oublié les adeptes du makossa puisqu’elle leur propose 3 titres « Coco », « Ndut’a muto » et « Folo Folo », une magnifique reprise du méga tube de Kotto Bass. Avec « Mulema », les salseros trouveront leur compte.
En définitive, cet album est un « Grand cru », que les mélomanes apprécieront et qui en feront à coup sûr un classique. La seule appréhension que nous avons est que ce « bijou d’album » ne rencontre pas le succès auprès d’un large public en raison notamment, d’erreur de stratégie-marketing à l’exemple de la première vidéo qui tourne dans les médias, laquelle est loin, mais alors très loin, de refléter la qualité de cet album.
En écoute “Songa la modi, une reprise de Toguy”
Ruth Kotto – album Bonam (Prod. RKN Paris – 2013)