“Flash Back”,l’éclair de génie d’un pianiste aux doigts d’or.

FlashBack_BowenMais quelle corrélation peut-il avoir entre un pianiste de renom et une tontine ? Curieuse question allez-vous dire. Mais il faut avoir le génie, le talent et l’intelligence d’un Justin Bowen pour tenter le pari et le réussir avec maestria. Car de tontine, il ne s’agit en effet dans notre propos que de la mutualité de talents que l’on retrouve dans la galette et dont le résultat est une pure merveille.

Prenez un Andy Manga, un Guy Nsangué Akwa, associez les à Wouassi Brice, Lobé BekomboValéry, Jacques Djeyim le tout saupoudré par les voix de Ndedi Dibango, Sissi Dipoko, Lokua Kanza sous la direction des doigts de fée de Justin Bowen, vous avez la réponse à la question posée d’entrée de jeu. Un éclair de génie ! Une création de haute qualité.

Lorsque l’on évoque la basse dans le monde, sans hésitation aucune, la synonymie avec le Cameroun est aussitôt établie. C’est pour cette raison que la prouesse est digne des génies, car l’évidence dont il est question dans la basse n’est pas de mise, lorsqu’on évoque l’instrument qu’il a dompté et ainsi réussir à se positionner comme l’incontournable, comme une institution à lui tout seul. C’est en ce sens qu’il faut appréhender et comprendre ce que représente Justin Bowen pour le piano dans la musique camerounaise et dans le monde.

Parmi ceux qui ont donné ses lettres de noblesse au ‘Makossa’ pour ne citer que ce rythme là, dont l’incontournable Ekambi Brillant, pour ne citer que lui, Justin Bowen a été de la partie dès les premières heures et tout jeune qu’il était, pour dessiner les contours, les orientations de celui-ci. Preuve si besoin était, que le garçon est un ‘dur’. Depuis il a fait du chemin et s’est imposé en Afrique et dans le monde comme une référence. Au point qu’une marque de café s’est attachée ses services pour promouvoir son image dans le monde.

Faisons notre flash back pour aboutir en 1996, lorsque sort ‘Flash Back’, l’album du Tontine Band de Justin Bowen. On se rend d’abord compte de la générosité de ce musicien qui rend hommage à la bonne musique, celle qu’il a contribué à mettre en place dans son Cameroun natal pour se convaincre d’autre part que Bowen est réellement un très grand musicien.

‘Flash Back’ est avant tout un album précurseur et de réhabilitation de l’exigence de qualité. Justin Bowen montre l’étendu de son savoir faire quant aux arrangements et sans exhibitionnisme aucun, démontre la maîtrise de son instrument de prédilection. Une année après ‘Wa’ de Henri Dikongué et bien avant Richard Bona, l’homme du ‘Cameroun de l’Ouest’, comme aimait à le présenter Manu Dibango pendant qu’il officiait encore dans le Soul Makossa Gang, avait déjà commencé à tracer la voie et à jeter les bases d’une autre orientation musicale, que les Richard Bona et d’autres suivront et porteront encore plus loin. Celle pour laquelle art et beauté sont intimement liés. Cette musique qui n’oppose pas ‘modernité’ et ‘tradition’, mettant les influences funky ou jazzy de l’époque au service de sa musique, de son univers. Justin Bowen a par cet album, rétabli les valeurs du travail bien fait.

Justin Bowen ne fait pas qu’être pionnier ou dans la réhabilitation, il réconcilie la musique camerounaise avec elle-même. Celle pour laquelle beauté, créativité, fraîcheur, potabilité, génie ne sont pas des concepts vides, celle qui a fait des musiciens camerounais des normes. Ces valeurs sacrifiées à l’autel de la médiocrité par cupidité. ‘Flash Back’ réconcilie notre ouïe avec la douceur du son, loin des agressions cacophoniques.

Lorsqu’on écoute ou réécoute ‘J comme Jackie’, ‘Itondi’, ‘Casa by Night’, ‘Wapa’ ou les autres titre, de cet excellent cru du meilleur claviériste de sa génération, on ne peut s’empêcher de lui rendre hommage d’avoir résisté à la bourrasque de pollution qui a réussi à emporter nombreux parmi ses pairs dans les décombres.

Treize ans après la sortie de cet album, on se pose la question de savoir s’il n’a pas connu le sort de ceux et celles qui sont toujours en avance sur les autres : la méconnaissance par ignorance. Étions-nous prêts, nos oreilles mieux préparées pour réécouter des productions d’une aussi bonne qualité après des années d’endoctrinement à la médiocrité ? Dans tous les cas, avec ‘Flash Back’ Justin Bowen démontre une fois de plus qu’il n’est pas toujours chose facile d’être en avance sur son temps et sur ses contemporains pendant qu’il montrait le chemin de ce qui devrait aujourd’hui être la voie à suivre.

Souhaitons seulement que le temps aidant, nous avons été rodés et rompus à la qualité grâce aux Gino Sitson, Avline, Richard Bona, Blick Bassy, Jaylou pour pouvoir apprécier à sa juste valeur ‘Rio dos Camaroes’, la nouvelle production du maestro Bowen Tchounou Justin.

FlashBack_Bowen
“Wapa”