Le coffret “A Multitude Of Angels” de Keith Jarrett, une façon de comprendre et de pénétrer dans le monde du pianiste.

Un rapide sondage auprès des jazzophiles à qui on pose la question : Keith Jarrett est-il un musicien que vous aimez ?  Engendre 50 % de oui avec des fans inconditionnels et 50 % de non qui n’adhèrent pas, qui n’aiment pas et qui vont avec reproche, rappeler le concert du 4 juillet 2014 où le musicien n’a pas fini son concert (comme si cela avait le premier et le seul musicien à l’avoir fait).

Comment se fait il que Keith engendre la passion ou la haine ?

Les professionnels de la psychologie croient nous aider en nous confirmant que l’amour et la haine prennent naissance au même endroit : dans la relation maternelle, engendrant une  vie fusionnelle pour la passion et la peur de la mort dans la haine. Merci les psys, mais en est-on plus avancé ?

Il semble qu’il ne nous reste plus qu’à écouter le coffret des albums enregistrés en Live, avec une grande vigilance aux émotions engendrées par leur écoute.
A Multitude Of Angels est composé de quatre CDs reprenant la dernière tournée de Keith Jarrett, avant sa pose de 1996 pour un syndrome de fatigue.
Leur titre en est le nom des villes où les concerts ont eu lieu: TEATRO COMUNALE, MODENA; TEATRO COMUNALE, FERRARA ; TEATRO REGIO, TORINO et TEATRO CARLO FELICE, GENOVA.

Premier conseil d’écoute : avoir du temps, comme tous les CD diriez vous, oui ! Mais là le premier morceau dure 34,18 minutes.
Donc il faut y rentrer progressivement, surtout que le concept de Keith est de partir dans des phrases musicales et de nous y emmener, avec souvent un début calme,

puis les phrases arrivent et une rythmique s’installe. Donc il faut être dispo et ne pas donner en même temps la soupe à votre dernier, sinon ça va mal finir pour tout le monde !!

Surtout arrêter l’écoute quand cela est trop. Comme la dégustation d’un grand cru, arrêter sinon indigestion et saturation vous guettent.
Un autre conseil indispensable: commencer par les morceaux plus courts comme « Encore » c’est à dire le bis de Ferrara, 3 minutes c’est plus facile à trouver dans nos emplois du temps. Et là, vous allez trouver et sentir le langage de Keith. Pour ma gouverne, c’est «Over The Rainbow» puis «Over Danny Boy» qui m’ont donné le virus pour cet album. Ainsi, progressivement, sans brusquer le processus de métabolisation, va être révélée devant et dans vos oreilles la création selon Keith Jarrett,  ses  gémissements jusqu’alors insupportables, prennent tout leurs sens: ce sont des cris d’enfantement (les psys avaient donc raison, il s’agit bien du lien maternel).

Quelques conseils pour continuer à savourer ces quatre CD: MODENA, “Part I” classique reposante au début qui va s’enflammer, avec “Part II” plus tourmentée, donc un CD bon pour le début de journée. FERRARA reste plus classique donc plus la fin de journée. TORINO est le CD le plus dissonant donc plutôt pour le weekend. Pour GENOVA très contemporain, avec beaucoup de gamme blues à conseiller pour les vendredis et les samedis soir.

Il ne faut pas nier que Keith Jarrett reste un artiste peu facile, il est vrai que cela ne fait pas parti de ses buts d’être abordable, la preuve en est, il n’a toujours pas de site web officiel.

Mais alors pourquoi pour certains le coup de foudre est-il immédiat et pour d’autres faut-il du temps pour y arriver ? Peut être que 15 ans de psychanalyste pourraient y répondre.

Mais ce qui est sûr, c’est que l’écoute du coffret A Multitude Of Angels de Keith Jarrett vous propose de percevoir son accouchement musical en direct  et peut être comprendre comment il a brusquement arrêté son concert solo à la salle Pleyel à Paris  le vendredi 4 juillet 2014 après avoir dit au micro “Je n’en ai plus à vous donner. C’est comme ça.”

Car un concert de Jarrett c’est participer avec lui à la création musicale.

La preuve ultime en est son album Köln Concert, enregistré en live sortit en 1975, l’album qui possède des records de vente inégalés dans l’univers du jazz, mais aussi de la musique classique.

Line Up : Keith Jarrett : Piano.

En écoute : ”Part I (Live At Teatro Comunale, Ferrara / 1996)”.