Robert BENDEGUE : Il faut sortir de la vision de l’État providentiel…

©Tribune2lartiste|Robert Bendegue
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L’idée a été exportée, s’est installée et fait son bonhomme de chemin. La ville de Douala comme d’autres métropoles à travers le monde, s’enivrera à la musique et confirmera son statut de ville d’ouverture et de culture par excellence qui lui colle à la peau à mesure que les années passent. Cette image qui se construit et se consolide par la hargne, la vision et le sérieux de certaines de ses autorités pour lesquelles, la culture est et reste l’élément fondateur par excellence d’une société donnée. Parmi ces personnes avec une vision culturelle constructive, monsieur Robert BENDEGUE, délégué du gouvernement de la culture à la ville de Douala. Homme passionné avec une érudition certaine en la matière, il s’active. A la veille de la fête de la musique prévue pour le 21 juin prochain, monsieur le délégué ne fait l’épargne d’aucun moyen pour donner des couleurs et du son à une journée de la musique. Une journée de la musique qui n’est pas seulement célébration de cet art, mais une journée qui favorise la mixité, la proximité, une journée d’échanges.

Une journée de la fête de la musique à Douala qui se déroulera sur quatre sites (Akwa, Bonabéri, Cité Sic, Village). Si c’est la 30ème édition de cette fête à travers le monde, au Cameroun nous en sommes aux balbutiements, mais des balbutiements déjà audibles et prometteurs. L’essentiel étant d’avoir mis sur pieds une plateforme qui offre de la visibilité mêmes aux plus improbables des musiciens.

Dans sa hâte, le délégué du gouvernement à la culture a pu m’accorder quelques instants pour répondre aux quelques questions que je lui ai posées.

Monsieur le délégué, pourquoi avons-nous du mal à valoriser notre Culture ?
Pouvez-vous acheter un Cd, un livre, aller au théâtre si vous n’avez pas encore résolu votre problème de loyer, de facture etc. ? La culture reste un bien de luxe, car nous n’avons pas encore atteint le stade de la satisfaction des besoins primaires hélas. De l’autre côté, il faut le dire, nous avons du mal avec la culture, parce que c’est une chose immatérielle, intangible donc difficile à quantifier.
Il faut savoir de quoi l’on parle, les Richard Bona, les Manu Dibango et bien d’autres encore n’ont pas attendu l’État pour promouvoir et leur travail et la musique camerounaise dans le monde. C’est à l’artiste de communiquer sur son travail et de le laisser à l’appréciation du public. Rien que par ces deux exemples, vous ne pouvez pas dire que notre culture ne se vend pas.

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Pourquoi l’État ne s’investit pas un peu plus dans la construction des infrastructures culturelles?
Ce n’est pas toujours à l’État de tout faire, il est temps de le dire à haute et intelligible voix. D’ailleurs à ce propos, pourquoi certaines initiatives privées s’obstinent-elles à n’ouvrir que des établissements de boissons ? Pourquoi ne mettraient-elles pas leur investissement dans des infrastructures qui favoriseraient l’industrie culturelle ? Je mets au défie quiconque d’ériger une salle de spectacle par exemple et de voir si l’État ne viendrait pas le solliciter. Il faut que nous sortions de cette vision qui consiste à tout attendre de l’État. Il y a eu des gens dans ce pays qui ont compris la valeur de l’investissement dans l’industrie culturelle sans attendre la permission de l’État et cela leur a plutôt bien réussi.

Quel est le but de cette fête de la musique au Cameroun?
Comme son nom l’indique, c’est d’abord une fête pour célébrer la musique et le musicien, professionnel ou non. La participation est libre et spontanée.
Le but est donc de décloisonner le spectacle et de le rendre accessible à tous par son caractère itinérant. Ce faisant, on décrispe la société tout en démocratisant l’art musical, puisque quiconque ayant une âme musicale peut se produire en spectacle. Il faut également voir un moyen de favoriser la proximité entre les acteurs de la musique et le public. Le musicien non professionnel à l’occasion de rencontrer le professionnel.

Quel est le constat qui conduit à l’importation de l’idée de la fête de la musique au Cameroun?
La pertinence de l’événement a favorisé son importation dans notre pays. Je souligne également que nous ne vivons pas en vase clos ou à la Robinson Crusoé. Des pays phares en matière culturelle ont eu cette idée et il n y a pas de mal à implémenter des formules pertinentes comme celles-là chez nous surtout à l’heure actuelle où le monde est un village planétaire.

Quelle est la particularité (la touche) camerounaise de l’événement ?
La particularité camerounaise de cet événement réside en la valorisation de la musique patrimoniale. C’est l’occasion de mettre en évidence toutes les musiques que regorge notre pays. Nous ne voulons pas céder à la tentation de ne mettre en évidence que de la musique urbaine. C’est donc une belle tribune pour la valorisation des musiques du Cameroun.