P.ANIAMBOSSOU: “En langage poétique c’est du Forcusbisme”
Pionnier, précurseur, Armand Pascal ANIAMBOSSOU est un maître dans son art. Son œuvre est encensée dans les 4 coins de la terre et sont une référence. Même s’il dit vivre des fruits de son art, il regrette cependant que l’inertie de son pays et de bien d’autres en Afrique, incapables de créer des conditions, ait été un facteur aggravant pour ne pas lui permettre de former des jeunes. Défenseur acharné de l’Afrique, il exprime toute sa colère envers les gouvernants africains dont le manque de vision pour le continent, livre celui-ci à l’autel du mépris…
Aujourd’hui la quatre-vingtaine sonnée, l’artiste reste un homme ouvert, en alerte et à l’écoute de son environnement comme le montre son propos ci-dessous.
Comment pouvons-nous accepter que ce soit toujours l’étranger qui vienne à notre secours, et qui nous mette en lumière ?
Avant de vous présenter à nos lecteurs/lectrices, j’aimerais savoir comment percevez-vous votre travail artistique. Est-ce comme œuvre prophétique comme j’ai pu le lire sur votre site ? Et si tel est le cas, comment se traduit cette prophétie dans vos œuvres ?
Mon œuvre artistique et picturale est essentiellement tournée vers la recherche permanente avec ses trouvailles et ses questionnements. Les premiers fruits de ses recherches ont donné il y a plus de 20 ans ce que certains experts ont dénommé : Les visages tourmentés et depuis quelques années mes créations se traduisent par une sorte d’aller-retour du cubisme, c’est le cubisme premier, le cubisme profond, le cubisme renouvelé, le cubisme renouvelable, celui –là même qui puise sa source dans les traditions artistiques africaines ancestrales. En langage poétique c’est du Forcusbisme.
Mon œuvre se veut prophétique en ce sens qu’elle est annonciatrice d’une ère nouvelle et ouvre de nouveaux champs dans la recherche picturale en Afrique et dans le monde. Mais à la vérité seule l’histoire le dira…
En quelques mots qui est Armand Pascal ANIAMBOSSOU
Je suis l’un des premiers peintres professionnels du Bénin et de l’Afrique.Actif depuis près de 60 ans et auteur d’une œuvre majeure avec des milliers de tableaux et de dessins répandus à travers le monde.
Beaucoup de livres et de publications situent mon œuvre picturale parmi les plus accomplies et la place parmi celles des plus grands : Il va sans dire que tout ceci ne me laisse pas indifférent, loin s’en faut.
Je suis aussi et surtout un artiste qui a rapidement découvert sa vocation et qui a vécu toutes les humiliations, frustrations en qualité d’artiste peintre mais aussi qui a souffert et continue de souffrir de la désorganisation totale du secteur culturel et du manque d’intérêt de l’élite africaine vis-à-vis de ce secteur. Comment pouvons-nous accepter que ce soit toujours l’étranger qui vienne à notre secours, et qui nous mette en lumière ?
ANIAMBOSSOU qui est votre patronyme, a-t-il une signification particulière en votre langue ?
Je suis en fait originaire du morceau de territoire qu’on appelle aujourd’hui Bénin mais mes grands parents viennent du Nigeria et précisément de l’ethnie appelée Youruba. Mon nom veut dire celui qui ne dort jamais avec la colère dans son cœur.
Quel sens donnez-vous à votre travail en général ?
Je suis tributaire de mon inspiration. Mes œuvres naissent généralement de façon spontanée sans préméditation ; je les découvre tout au long du processus de création et je les accompagne tout en essayant de leur donner mon onction personnelle, ma touche à moi. Mais en définitive elles me semblent étrangères. Il m’arrive de me demander parfois si j’en suis vraiment le vrai auteur.
Et quand le peuple se lèvera
Qu’est ce qui à ce jour a été votre source d’inspiration principale et pourquoi ?
Je n’ai pas une autre source d’inspiration que la vie en elle-même tant elle est riche, diverse et toujours en mouvement.
Mais la mort aussi m’inspire en ceci qu’elle fait partie intégrante de la vie. Sans elle la vie perd de sa raison d’être, de sa substance voire elle devient impossible.
Comment se déroule le processus de création d’une œuvre chez vous ? Est-ce le même processus observé dans chacune d’elles?
Comme je vous l’ai indiqué précédemment ma démarche créatrice est d’abord volontariste car c’est bien moi qui décide de me saisir d’un pinceau et de me présenter devant mon chevalet, mais lorsque je suis face à la toile je n’ai plus totalement la maîtrise des événements, mais j’y participe à coup sûr parfois en maître parfois pas, mais enfin ce qui compte c’est la beauté et l’originalité de ce qui en sort.
“J’aurais pu, n’eut- été les conditions de travail et l’environnement inappropriés qui caractérisent nos pays, former de nombreux jeunes africains pour maintenir la flamme allumée.“
ANIAMBOSSOU a-t-il profité des fruits de ses œuvres ? Dans les deux cas (oui/non) quelles en sont les raisons ?
J’ai toujours vécu de mon travail tant et si bien que je n’ai exercé que ce métier là.
Maintenant en ai-je profité des fruits : Oui et non.
Oui !!Parce que je suis toujours en vie et continue de travailler.Non!! Parce que j’aurais pu mieux faire, j’aurais pu, n’eut- été les conditions de travail et l’environnement inappropriés qui caractérisent nos pays, former de nombreux jeunes africains pour maintenir la flamme allumée.
Vous qui êtes un maître et avez une longue et riche carrière, pouvez-vous nous dire qui sont en Afrique vos inspirateurs, vos modèles, vos mentors ?
Ayant commencé très jeune, je n’ai pas vraiment eu de modèles, mais j’ai fait des rencontres qui ont changé le cours de mon existence et lui ont donné du sens. De fait c’est un jeune congolais qui se promenait avec ses tableaux comme le font les marchands à la sauvette qui m’a montré ses tableaux peints et plus tard m’a initié. Si je puis dire, à la composition de la palette et ce fut le début d’une longue, très longue aventure picturale et humaine. Je ne l’ai plus jamais revu hélas.
Avez-vous la même hargne ou la même passion pour votre art aujourd’hui comme à vos débuts ?
Chaque jour m’apporte de nouvelles joies surtout lorsque je parviens à trouver des compositions que je n’ai pas cherchées. C’est un bonheur toujours renouvelé qui n’est pas exprimable par les mots, car les plaisirs de l’esprit contrairement à ceux de la chair ne sont point précaires et évanescents. Leur félicité ne peut être contée…
De toutes vos œuvres, choisissez en deux que vous estimez être les plus abouties à vos yeux, pourquoi le sont-elles et décrivez-les nous.
En ce qui me concerne, Il n’ y a pas d’œuvre aboutie ou pas aboutie/ C’est tout le problème de la création artistique. Toutefois j’ai des tableaux pour lesquels j’ai une plus grande sensibilité eu égard au moment de leur création et aux circonstances qui les ont déterminées : c’est l’hypothèse du tableau intitulé : La Joconde noire qui est une commande de mon fils Alain Alfred et pour lequel il a écrit un beau poème que je vous ferai découvrir à l’occasion. La Joconde noire est une œuvre de représentation de la beauté féminine avec tout ce qu’elle a de sensuel et de rêverie/ Le choix du visage revient au contemplateur, le reste du corps étant là, splendide, délice de tous les délices…
La Joconde noire
Le 2e tableau est plus classique: on y voit tout et on peut s’imaginer tout. A la vérité, il est une invitation à tous nos contemporains à être les gardiens de la nature; et à ne pas la souiller car elle demeure notre mamelle nourricière, nous d’aujourd’hui et ceux de demain.
La cocoteraie
“Le temps est venu pour les africains de se souvenir de leur passé pharaonique, de s’unir pour être plus forts et mieux résister aux complots permanents de l’étranger.“
Où peut-on voir et acquérir vos œuvres ?
On peut voir et découvrir mes œuvres à Paris en appelant le 0627557646 ou via internet : www.artmajeur.com/aniambossou
www. Facebook.com/armandpascal.aniambossou. Pour en faire une commande écrire à l’adresse mail suivante : amoutapam@yahoo.fr
Le mot de la fin vous revient.
Étant un homme d’un âge avancé, bientôt 80 ans, j’ai pu accumuler quelques expériences tout au long de mon existence, et ai fait le constat constant que nous souffrons en Afrique d’un manque d’organisation dans tous les domaines. Cet état de fait fragilise totalement nos sociétés, engendre la misère et le désordre et crée le mépris que nous connaissons à travers le monde en notre qualité d’africains.
Le temps est venu pour les africains de se souvenir de leur passé pharaonique, de s’unir pour être plus forts et mieux résister aux complots permanents de l’étranger.
Le temps est venu pour nos gouvernants de penser d’abord aux peuples qu’ils gouvernent et à leur bien être car c’est la seule voie pour eux de rester et de marquer l’histoire. L’autisme narcissique auquel ils livrent pour la plupart contribue à entretenir le mépris dont est victime l’homme africain. Je vous remercie.