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Rio Dos Camaroes : Voyage sur 12 senteurs du Cameroun

Si sa musique est un voyage, une aventure ; lui par contre n’est pas un aventurier de la musique mais un connaisseur. Incontestablement Justin Bowen est une grosse pointure de notre patrimoine musical et
Il est, à l’image de Richard Bona dont il dit l’admiration pour son travail, une marque. Oui ! Musicalement, la griffe Justin Bowen est à jamais gravée sur le marbre qui constitue le mur de la musique camerounaise.
Deux albums, mais deux bijoux!
Rappelons qu’au moment de la traversée du désert d’un volet de la musique camerounaise, investie par des rythmes venus d’ailleurs ; conséquence d’un manque d’inspiration et de l’appât du gain facile qui animaient les uns et les autres, Justin Bowen était celui qui, parmi les instrumentistes camerounais, courageusement a pris le bâton de pèlerin pour affronter cette bourrasque pour rompre la spirale et donner le cap en commettant ’’Flash Back’’. Titre éponyme d’une galette qui avait en même temps le mérite et le tort d’être une œuvre pionnière, mais ô combien salvatrice pour notre musique. Une voie que suivront nombreux d’autres instrumentistes dont l’excellent Richard Bona et aujourd’hui les jeunes loups aux griffes bien aiguisés comme Blick Bassy.

En récidivant avec ’’ Rio Dos Camaroes ’’, promenade sur 12 effluves du triangle nationale, Justin est resté fidèle à lui-même, c’est-à-dire, puiser dans les profondeurs de notre patrimoine culturel comme cette voix qui ouvre l’album dans ’’Mangassa & Tene Family’’, puiser dans certains codes de jeux de récréation comme dans ‘’’Mot de passe’’ pour nous offrir un régal musical. Des coups d’œil adressés ci et là à des rythmes encore vierges de tous viols extérieurs comme dans ’’Bikutsi Show’’, dans lequel Queen Etémé confirme qu’elle est vraiment la wonderfull woman. Comme également ce clin d’œil fait au maître incontesté Aladin Bikoko dans ‘’Aladain’’.
Dans ’’Banda Eva’’, Justin Bowen rappelle de temps à autre qu’il a des doigts de génie, lorsqu’avec son piano, il nous transporte vers des univers qui nous rappellent notre proximité réelle avec les Antilles…Tout un voyage !
Justin Bowen continue dans la voie qu’il a, presque 16 ans aujourd’hui tracée en  redorant à sa manière le blason de cet art qu’il dit être un véritable métier qui mérite respect d’abord par les acteurs et les consommateurs que nous sommes.

Cet album prend une saveur particulière avec la présence de deux autres personnalités musicales qui aujourd’hui nous observent de loin, mais dont la présence dans l’aventure initiée par Justin Bowen rehausse davantage la qualité de celle-ci par leur savoir-faire : d’une part Charlotte Mbango dont la voix dans ’’Nkosso Blues & Saint Thomas & Dikendis’’ nous rappelle que la musique est éternelle lorsqu’elle est bien faite et portée par des voix qui vous caressent. Et de l’autre, le groove du métronome Valéry Bekombo Lobé dans les percussions et la Batterie aux côtés de Roger Raspail.
Faut-il ici rappeler que par la maîtrise de leurs instruments, on ne saurait faire passer incognito le phrasé d’un André Manga, la vélocité du gaucher « bassant »  à la voix de velours Vicky Edimo (Ngosso Blues) et le doigté de André Marie Tala dont les seuls présences confèrent à cet album toute sa prestance.

Une fois de plus, Justin Bowen nous entraîne dans une  aventure musicale de haute facture qui certes nous réconcilie avec notre patrimoine culturel mais trahit aussi l’insuffisance de la mise en valeur de ce patrimoine que le reste du monde nous envie pourtant. Rio dos Camaroes’’ est une œuvre d’art faite par un artiste aux doigts d’or.


En écoute “Ngosso Blues”

Jean-Jacques Dikongué

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