Si les années 1990 ont coïncidé avec ce que d’aucuns nomment la renaissance, la résurrection via la sortie de son CD (Beza Ba Dzo), il convient de dire que Mme Anne Marie NZIE a continué d’exister dans les chaumières averties qui n’ont pas attendu le Cd qu’ils savourent somme toute, pour continuer à jouir de la voix d’or de cette diva et ainsi regarder défiler l’histoire de la musique camerounaise et africaine par le truchement de ses disques vinyles ou cassettes. Car entendre les chansons de Anne-Marie Nzié c’est comme se placer devant un miroir. Ce miroir devant lequel toutes les générations de musiciens et de mélomanes camerounais se devraient de se regarder pour se rappeler que grâce aussi à cette dame, notre musique avait connu la gloire et était autre chose que la simple musique d’ambiance, ou la singerie inélégante des rythmes venus d’ailleurs à laquelle certains ont voulu l’assigner et continuent de batailler pour l’y maintenir. Mais pour combien de temps encore ?
De même que la machine à oubli politique qui a entrepris l’effacement du culturel, ne saurait en rien oblitérer la mémoire individuelle du mélomane, du vrai amoureux de la musique, celui qui a été bercé et élevé à la voix chaloupée de la mère de la musique camerounaise. Malgré sa ‘disparition médiatique’, ce mélomane a continué à reconnaître le mérite d’une femme d’exception, qui est plus qu’une icône pour plusieurs générations.
Mais le cas Anne Marie Nzié, à la lumière de ce qu’est la vie d’un artiste au Cameroun est loin d’être unique. Le Cameroun ploie plutôt sous des cas malheureux comme celui-là. Elle ne doit son salut ou sa résurrection ‘officielle’ qu’à son unique tempérament. Grâce à son ’impertinente audace’, elle a affronté et défié la gangrène qui ronge la culture au Cameroun. En apostrophant les autorités par l’interdiction, lorsque cela se produira, à ne pas participer à un concert d’hypocrisie comme seules dans les oraisons funèbres on sait l’organiser, elle a à coup sûr échappé à une fin dont le scénario avait été écrit une fois qu’on prend le parti de faire ce métier hélas, dans ce pays. En exigeant une reconnaissance de son vivant et non à titre posthume, cette ambassadrice de la culture camerounaise a retourné le plat d’ingratitude souvent très servi à celles et ceux qui portent haut les couleurs nationales, contre ceux là même qui ont en charge de tracer le cap, de donner la vision de la chose culturelle. De même pour la population souvent très ingrate et prompte à reléguer dans le détail et le vulgaire celles et ceux qui pourtant, des années auparavant ont été leurs héros. Quoi de plus normal pour cette dame que de réclamer un chouia de reconnaissance ! Mais fallait-il en arriver là au point de ternir son image aux yeux de certains ?
Car ce qui a permis à Anne Marie Nzié de se hisser au sommet, l’a une fois de plus sauvé du destin peu flatteur qui l’attendait. Son courage à affronter et à plier le cours des choses. Et nous ne pouvons que nous en réjouir et lui rendre cet hommage en lui réitérant notre sympathie et notre respect pour son travail d’artiste d’exception.
Bien sûr la tentation n’est plus canalisable, elle se fait même pressante chez nombreuses de ces filles qui se sont lancées dans ce métier ô combien exaltant et ingrat à la fois. Celle de ravir la couronne de ‘reine de bikutsi et de la musique camerounaise’ à cette grande dame, par l’auto proclamation, une autre tentacule de la pieuvre étouffante qui asphyxie la musique camerounaise. Mais par décence, et surtout par objectivité, prière de patienter car l’heure est d’abord aux preuves pour vous toutes et tous, car la vraie reine du bikutsi et de la musique camerounaise est encore en vie et entend encore nous faire vivre de bons moments de musique potable et saine et son nom est Anne Marie Nzié. Sa longévité et son travail parlent et parleront toujours en sa faveur et son titre n’est pas le résultat d’une auto proclamation, mais d’un travail avéré et reconnu.
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